Genre : policier inclassable et indémodable
LOUIS MALLE | 1958, noir et blanc
La Médiathèque de Saint-Fons recèle de perles que nous vous proposons ici. Des films méconnus, oubliés, qui ont cependant marqué l'histoire du cinéma par leur originalité cinématographique ou par la teneur des propos tenus.
Synopsis :
Ancien officier militaire ayant servi en Indochine, Julien Tavernier vit une liaison passionnée avec Florence, l’épouse du patron qui l’a recruté comme homme aux mains sales à Paris après la guerre. Une passion tellement folle qu’elle les met d’accord sur l’assassinat de ce dernier. Julien se charge d’exécuter le meurtre sur son lieu de travail. Le crime aurait pu être parfait si Julien n’était pas revenu sur ses pas pour effacer des traces et ne s’était pas ainsi retrouvé coincé dans l’ascenseur, éteint pour la nuit.
Pendant ce temps, deux jeunes gens se laissent tenter par la belle voiture de Julien garée devant le bâtiment. Pris par l’ivresse de la transgression, les voilà à des kilomètres de Paris dans un hôtel où leurs voisins de location leur donnent à espérer plus encore. Mais, cette fois, leur larcin tourne mal.
Le lendemain, Julien s’extirpe de l’ascenseur sans être vu mais est arrêté par la police pour le meurtre du couple logé à l’hôtel… Florence cherche par tous les moyens à l’innocenter. Mais Julien peut-il vraiment échapper à la justice ?
Rien ne prédisposait ce premier long-métrage de Louis Malle à un tel succès. Louis Malle n’était qu’un jeune cinéaste débutant ayant fait ses armes dans l’art du documentaire vidéo et quelques court-métrages. Le film ne reprend pas non plus véritablement, pour une base solide, le roman policier du même nom dont il propose l’adaptation.
Si ce n’est que Louis Malle, à défaut de répondre aux canons du cinéma français en cours de cristallisation, fait l’expérience d’une certaine liberté de la vision cinématographique dans le cadre de fonctions d’assistant et ose enfin exprimer sa propre vision et un anti-conformisme participant du mouvement de la Nouvelle Vague. Et que le film a eu pour bande originale une improvisation jazz menée par un grand jazzman de l’époque, Miles Davis.
Certains éléments révolutionnaires pour l’époque (le tournage avec des caméras légères, dans les rues ou de vrais bâtiments comme simples décors) sont désormais une banalité pour le spectateur d’aujourd’hui. En revanche, le montage et la bande originale, inclassables, sont indémodables.
L’intrigue, tout d’abord, déjoue les pronostics et crée un suspense soutenu : histoire d’une cavale à l’impunité éhontée, d’une passion mortelle pour les amants ou bien d’un quiproquo judiciaire incroyable ? La lumière et la musique sont également parfaitement dosées pour exprimer le fil du crime passionnel sur lesquels avancent les deux amants tiraillés entre l’amour et le désespoir. Enfin, certains sentiments ou certaines actions, comme l’expression de leur passion entre les 2 amants lors de la scène d’ouverture, sont tournés avec une expressivité jugée impensable aujourd’hui (au risque sinon de tomber dans la comédie romantique commerciale) qui est pourtant le ton juste pour cette intrigue et ces personnages.
Bref, un film qui vous tient jusqu’au bout.
Emilie